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Polices (et) révolutionnaires en Europe, des années 1780 à la fin des années 1980 Pratiques, acteurs et représentations,

Polices (et) révolutionnaires en Europe,

des années 1780 à la fin des années 1980

Pratiques, acteurs et représentations,

 

Université de Caen-Normandie

31 mars – 1er avril 2022

 

Colloque international co-organisé par les équipes HisTeMé EA 7455 (Université de Caen), IDHE.S UMR CNRS 8533 (Université Paris 8), et DAMOCLES (Université de Genève).

 

Avec le soutien de l’École Doctorale 558 – Histoire, Mémoire, Patrimoine, Langage – de l’Université de Caen et du Centre de Recherche des Officiers de la Gendarmerie Nationale

 

Comité d’organisation

Félix Brêteau (Doctorant, Université Caen-Normandie/HisTeMé/), Thomas Hippler (Professeur Histoire contemporaine, Université Caen-Normandie/HisTeMé), Anne de Mathan (Professeure Histoire moderne, Université Caen-Normandie/HisTeMé), Vincent Milliot (Professeur Histoire moderne, Paris VIII/IDHES), Corentin Sire (Doctorant, Université Caen-Normandie/HisTeMé)

 

 

Comité Scientifique : Pierre Serna (Université Paris Panthéon Sorbonne, IHMC), Michel Biard (Université de Rouen, Ghris), Vincent Denis (Paris Panthéon Sorbonne, IHMC), Marco Cicchini (Damocles-Université de Genève).

 

 

Appel à communications

 

« Art de gouverner les hommes » selon les définitions d’une police englobante héritée de l’Ancien Régime, les polices européennes connaissent à partir de la fin du XVIIIe siècle des transformations profondes les conduisant à devenir des institutions fondamentalement sécuritaires, aux domaines d’interventions plus resserrés. Si la diversité territoriale des pratiques interdit de figer la police dans une acception homogène, ses forces trouvent a priori partout leur justification dans la contribution qu’elles apportent à la construction et à la préservation de l’ordre public, certains des corps qui la constituent recevant le monopole de l’exercice de la violence légitime.

 

L’ouverture de l’ère des révolutions à partir des années 1780 soulève nombre de questions d’une ampleur inédite pour les responsables et les acteurs du maintien de l’ordre public, à la fois sur un plan pratique lorsque s’enflamme le corps social, mais aussi au plan institutionnel et politique, alors même que les systèmes policiers européens sont engagés à des titres divers dans des dynamiques de professionnalisation, marquées par l’évolution des pratiques policières et, par contrecoup, par celle des rapports avec les populations. Fondamentalement associée à l’exercice d’une souveraineté, la contestation des principes ou des modalités d’exercice de cette souveraineté, place la police sur la sellette. Toute remise en cause de la légitimité des pouvoirs institués pose de manière aigue celle de la légitimité des forces censées défendre ces mêmes pouvoirs. Critiquée, ébranlée et parfois profondément divisée, la police devient cible et symbole d’un ordre honni par certains autant que sollicitée et intensément mobilisée pour défendre cet ordre. Lorsque triomphent les aspirations révolutionnaires, elle est sommée de se transformer radicalement et de se « révolutionner » pour accompagner l’émergence d’un ordre nouveau, du moins dans son organisation alors que l’inertie de certaines pratiques constitue souvent un phénomène frappant.

 

Ce colloque qui est situé au carrefour de deux chantiers historiographiques profondément renouvelés au cours des dernières années – l’histoire des révolutions, l’histoire des polices -, ambitionne d’explorer à l’échelle européenne et de manière comparatiste cette multiplicité de relations entre polices et crises révolutionnaires, entre polices et mouvements révolutionnaires, massifs ou plus confidentiels, aux modes d’intervention politique et aux systèmes de représentations variés.

Du cycle des « révolutions atlantiques » (J. Godechot et R. Palmer) dans les années 1780 jusqu’aux « années de plomb » et à l’effondrement du « bloc de l’Est » à la fin des années 1980 lorsque s’épuisent certains paradigmes et représentations politiques, il s’agit d’interroger la manière dont acteurs et responsables des forces de l’ordre, civiles ou militaires, se sont confrontés et adaptés aux divers groupes, mouvements et projets révolutionnaires pour les endiguer, les contrôler, parfois les manipuler en fonction de leurs caractéristiques et selon les contextes.   Mais il s’agit aussi de s’intéresser à la manière dont les policiers peuvent, lors de crises paroxystiques, devenir à leur tour révolutionnaires, militants et acteurs du renversement de l’ordre ancien, puis défenseurs de l’ordre émergeant. Les révolutionnaires se faisant eux-mêmes policiers et développant de nouveaux répertoires d’action, la production ou l’élaboration de nouvelles configurations de l’ordre avec leurs justifications, les réflexions attachées à la police dans une société idéale, voire envisageant l’absence du besoin de police, doivent aussi retenir l’attention.

 

Plusieurs axes peuvent orienter les réflexions collectives à venir et les propositions de communication :

 

  • On accordera une importance particulière aux pratiques et aux pratiques croisées. Comment la définition d’une « menace » révolutionnaire, d’intensité variable détermine-t-elle les pratiques policières ? Du maintien de l’ordre le plus immédiat à la crise révolutionnaire dans son ensemble, incluant les débats autour des fondements institutionnels et politiques de l’ordre public, comment acteurs et responsables de la police agissent-ils et réagissent-ils ? Qu’en est-il de l’élaboration de nouvelles pratiques de contrôle, de surveillance et de contention, de l’apparition de nouveaux savoirs policiers, de leurs circulations, des échanges et des collaborations entre police lorsque la révolution s’internationalise ? Pour leur part, comment les révolutionnaires s’adaptent-ils aux répertoires de l’action policière et surtout, comment envisagent-ils de se substituer aux forces de police de l’ordre qu’ils contestent, en assurant la promotion de principes et de pratiques adaptés à leur idéal politique ? Peut-on révolutionner les pratiques policières en même temps que l’ordre public ?

 

  • Cette réflexion sur les pratiques est aussi tributaire de la diversité des forces de police comme de celle des mouvements révolutionnaires, hétérogènes dans leurs formes d’organisation et d’intervention, depuis l’action clandestine jusqu’au mouvement de masse, du recours aux armes et à la propagande par le fait au syndicalisme révolutionnaire. Les identités professionnelles, la place occupée au sein des institutions, la nature des relations entretenues avec la population, certains contextes et certaines formes de régulations sociales pré-existantes, rendent-ils plus ou moins perméables, fragiles ou au contraire inflexibles, envers l’événement révolutionnaire et envers les acteurs qui le portent ? Groupes et mouvements révolutionnaires, en fonction de leur structuration et de leurs projets, limitent-ils leurs rapports avec les forces de l’ordre à la seule confrontation, plus ou moins directe, à la violence et au rejet ? Sont-ils plus ou moins prêts, sinon désireux d’assumer des fonctions policières et régulatrices, dans ou à l’exclusion de quels domaines ? Les situations de double pouvoirs, caractéristiques des moments révolutionnaires, conduisent-elles à la prolifération des organes sécuritaires et des acteurs de la police, à la confrontation de styles policiers différents et concurrents ?

 

  • Enfin, que peuvent produire les bouleversements et les aspirations aux bouleversements de l’ordre politique, économique et social en matière de police, d’ordre public et de régulations sociales ? Comment la révolution politique et institutionnelle peut-elle ou doit-elle révolutionner la police ? Du pamphlet ou du périodique au programme politique, du lourd traité au débat public au sein de diverses assemblées, nouvellement créées ou anciennes, peuplées de nouveaux acteurs ou de forces plus traditionnelles, comment envisage-t-on à la fois la refondation de l’État, celle de la société et celle des polices ? Certaines institutions, certains corps doivent-ils disparaître ou être réformés et jusqu’à quel point ? D’autres doivent-ils être créés ? Certaines pratiques doivent-elles être proscrites ? Les utopies politiques et sociales peuvent-elles croiser les utopies policières ? Peut-on policer une société sans police ?

 

 

 

Modalités pratiques

 

 

Les interventions, d’une durée d’une vingtaine de minutes, pourront être présentées en français ou en anglais. Les propositions de communication, attendues pour le 30 novembre 2021 au plus tard, sont à envoyer au format pdf à l’adresse suivante : police(et)révolutionnaires@gmail.com.

 

Elles comprendront les coordonnées institutionnelles pour l’envoi des réponses comprenant un intitulé et un résumé de la communication (une à deux pages) ainsi qu’une bibliographie indicative et une courte notice biographique de l’auteur (une dizaine de lignes).

 

Les frais de déplacement et d’hébergement seront pris en charge.