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L’imagerie postale de la Révolution française, par Grégory Aupiais

Une révolution dentelée ou l’imagerie postale de la Révolution française du FRONT POPULAIRE à nos jours

Le timbre-poste est assurément une création voire même une « créature » révolutionnaire. Son invention est intervenue le 1er janvier 1849 sous et d’une certaine manière par la iie République. Dès l’origine également, il présenta une perméabilité pour ainsi dire structurelle à l’événement en faisant d’une part la synthèse de l’héritage iconographique de l’an i et d’autre part de ceux plus proches de 1830 et de 1848. Toutefois, l’espace d’expression laissé par la symbolique monétaire dans laquelle il s’était inscrit initialement ne lui permettait guère que d’enregistrer indirectement des évolutions politiques majeures. Au fur et à mesure cependant, s’est déployé tout un corpus thématique de plus en plus complexe explorant aussi bien les aspects politiques, économiques, sociaux ou encore culturels.

Ainsi, la commercialisation en août 1917 durant la Première Guerre mondiale d’une série de huit figurines vendues avec une surtaxe au profit des orphelins de guerre constitua en France une autre étape majeure dans la construction de l’imagerie postale contemporaine. Ces différentes évocations, des familles des soldats disparus, des tranchées, de la résistance française et de la victoire contribuèrent à élargir ce spectre thématique plutôt étroit et allait de pair également avec une volonté de séduire un public beaucoup plus large allant bien au-delà des seuls philatélistes compulsifs. Celui-ci s’est de nouveau élargi en 1924 à l’occasion des Jeux Olympiques de Paris jusqu’à se figer en neuf registres majeurs à la fin de la décennie 30[1]. De plus, la définition presque conjointe d’un calendrier annuel des émissions de timbres-poste lui conféra en parallèle un caractère répétitif, presque routinier, alternant d’une manière pour ainsi dire séquentielle, séries touristiques, personnages célèbres, commémorations d’événements historiques ou exemples de nationalisme technologique plutôt peu enclins à favoriser ultérieurement un intérêt historiographique. Son caractère prégnant contribua même plutôt à l’oblitérer de la mémoire collective, jusqu’à en effacer bien souvent jusqu’au souvenir. Une indifférence sociétale qui masque cependant l’expression d’une véritable richesse iconographique et qui a constitué au fil des ans un véritable « panthéon » philatélique[2]. Toutefois, au sein de ces différents corpus thématiques, certains, comme la commémoration d’événements historiques, par exemple, mais pas seulement sont porteurs d’une identité beaucoup plus forte et si la Seconde Guerre mondiale se taille incontestablement la part du lion, la Révolution française arrive, quant à elle, en seconde position. De la première évocation indirecte en 1936 jusqu’à l’acmé philatélique de 1989, l’imagerie postale porte en effet l’empreinte de l’évolution des représentations de l’évènement dans la société française contemporaine[3].

Un objet singulier

Le timbre-poste est par excellence ou plutôt était un objet banal du quotidien et du geste ordinaire. En effet, ces petits carrés ou rectangles de papier gommé et désormais aussi autocollant semblent progressivement se détacher de la quotidienneté des Français dans laquelle ils étaient pourtant jusqu’alors solidement enracinés. Cette tendance se dessina timidement dans la décennie 90 et s’est très nettement confirmée depuis. En 1991, le courrier générait près de 71 % des revenus de l’opérateur public. En 2018, il n’en représentait déjà plus que 28 % et ce poste budgétaire est celui qui avait enregistré le plus fort recul[4]. Toutefois, si le volume des lettres a effectivement chuté de près 50 % entre 2008 et 2018 et même à terme de plus de 70 % selon certaines projections courant jusqu’en 2025, c’est toujours près de neuf milliards de plis qui sont échangés chaque année et qui, tout du moins pour la très grande majorité d’entre-eux, diffusent indirectement comme autant de représentations officielles de l’Etat[5].

Cependant, un tel constat plutôt objectif n’a pas généré d’intérêt historiographique particulier et encore moins hypertrophié. Sur ce point, les deux guerres mondiales semblent avoir joué un véritable rôle de catalyseurs. Il est possible que le timbre-poste à l’effigie du maréchal Pétain qui illustra la première de couverture de la seconde édition française du livre emblématique de Robert Paxton, « La France de Vichy 1940 – 1944 » y ait plus que largement contribué[6]. Toutefois, ce fut d’abord et pendant longtemps sous un angle exclusivement propagandiste. Le timbre-poste, objet d’histoire, émerge en effet dès 1972 avec l’article pionnier, devenu fondateur, de William A. Hoisington[7]. Cependant, il n’obtint véritablement en France ses premiers accessits académiques qu’en 1991 à l’occasion de l’exposition « La propagande sous Vichy » organisée du 17 mai au 20 juillet 1991 à l’Hôtel national des invalides par la Bibliothèque de Documentation Internationale Contemporaine[8]. Dans une synthèse méthodologique que publia ultérieurement Laurent Gervereau, l’un des co-auteurs du catalogue, celui-ci dressa dans son troisième chapitre intitulé « Sources et cas concrets » un inventaire des différents documents iconographiques utiles à l’historien et précisa sans ambiguïté que : « la philatélie s’avère un terreau fertile pour le décrypteur d’images »[9]. Un exemple pas si isolé que cela d’ailleurs car il faut y ajouter la communication de Claude Levy et de Dominique Veillon présentée lors du colloque « Vichy et les Français » ainsi qu’un ouvrage et un article légèrement postérieur mais presque programmatique de Denis Peschanski[10]. Plus récemment et bien que les timbres-poste soient totalement absents de la somme de Pierre Nora sur Les lieux de mémoire, ils ont été envisagés plus sous un angle mémoriel, tout du moins pour ce qui concerne les deux guerres mondiales ou la Résistance[11]. Laurent Douzou et Jean Novosseloff ont initié, par exemple, une approche globale de l’objet dépassant les aspects strictement iconographiques en exploitant d’une manière systématique les dossiers d’émission qui regroupent d’une manière aussi inégale que disparate l’ensemble des documents qui ont précédé l’émission d’un timbre-poste ainsi que les maquettes des « non-émis », à savoir les projets qui ne connurent aucune destinée philatélique[12]. Ces deux auteurs ont démontré d’une manière plutôt magistrale qu’il était possible voire même raisonnable de faire de l’histoire à partir des timbres-poste et qu’il n’y avait pas lieu qu’ils restent l’apanage des revues spécialisées. Une telle approche n’était cependant pas neuve mais elle n’avait jusqu’alors pas reçu une telle onction universitaire. En effet, les dossiers d’émission étaient en eux-mêmes déjà bien connus des archivistes spécialisés mais ils n’avaient été que très peu exploités. Quelques travaux de recherche universitaire commencent en effet à s’y intéresser timidement dans les années quatre-vingt-dix et ils constituèrent surtout la base documentaire d’un ouvrage de synthèse publiée par les Editions Flohic dans le cadre d’une série relative au patrimoine des institutions françaises[13].

Dans la foulée des propagandistes, un autre courant porté par David Scott a voulu voir le timbre-poste comme un objet sémiotique. Mais cette approche pour novatrice qu’elle soit, à la croisée des disciplines entre histoire et sciences de l’information, n’a pas connu tout du moins en France d’importants développements en dehors de la production scientifique de son inventeur[14]. Presque conjointement également, un autre axe s’est détaché dans la lignée des travaux de Maurice Agulhon sur la symbolique républicaine qui ne les avait toutefois pas abordés ou tout du moins d’une manière très marginale pour ne pas dire anecdotique[15]. Certains de ses épigones furent en revanche beaucoup plus prolixes. Un article leur a ainsi été consacré dans l’hommage rendu à Raymond Huard par l’université Paul Valery à Montpellier en 1995 et surtout dans les mélanges offerts à Maurice Agulhon en 1998[16]. Elle a initié également des approches comparatistes notamment entre la France et l’Allemagne. Ainsi, Alain Chatriot a livré une analyse comparée des figures philatéliques de la souveraineté nationale à travers les représentations de Marianne et de Germania[17]. Plus récemment le même auteur a esquissé une synthèse sur cette source singulière portant aussi bien sur des points méthodologiques qu’historiographiques[18]. Enfin en collaboration avec Michel Coste, il a rédigé en 2002 la notice sur le timbre-poste dans le Dictionnaire critique de la République[19].

Une dernière catégorie bibliographique semble enfin plutôt relever d’un véritable « cabinet de curiosités ». Cet espace historiographique regroupe un ensemble de publications plutôt hétérogènes, voire même singulières, sur un objet qui ne l’est déjà pas moins structurellement. Elles partagent cependant le point commun de s’intéresser généralement à des aires géographiques dans le cadre d’une approche chronologique souvent transversale, tout du moins dans un temps long. C’est le cas ainsi de l’article novateur de Jacques Leclerc sur l’Indonésie, mais également ceux de Jean Sarraméa sur l’Egypte, la Corée du sud et la Turquie ou plus récemment encore de Frédéric Rousseau qui a exposé les principaux enseignements qui peuvent être tirés d’une analyse comparée des philatélies Ouest et Est-allemande de 1949 à 1989[20]. Une telle approche peut également concerner des territoires plus limités, telles des régions, à l’image de ceux qui ont été consacré à la Bretagne[21]. Mais, ils peuvent s’intéresser également aux représentations d’un même événement ou personnage historique des origines de l’imagerie postale à nos jours[22].

Imagerie postale et Révolution française, éléments d’approche globale

C’est dans cette dernière catégorie que peut être classé un petit corpus composé à ce jour de cinquante-trois timbres-poste et pour lequel la Révolution française a constitué le thème principal ou parfois un simple arrière-plan thématique. La première émission intervint à la fin de la iiie République à une période où l’imagerie postale se structure étape par étape avec deux principaux jalons. D’une part, la création de la Commission des timbres-postaux qui désormais définit ou arbitre les émissions de figurines postales et d’autre part le principe d’une annualisation du calendrier sous la férule administrative du 3ème bureau de la sous-direction des services postaux. Le rôle de ce dernier devint absolument prépondérant excepté durant la période du gouvernement de Vichy où les réunions de la commission des timbres-postaux devinrent apériodiques et ses décisions perdirent leur caractère collégial, comme d’ailleurs l’usage de rédiger un compte-rendu à l’issue de chaque séance. Episodiquement, elle reçut en effet des instructions émanant directement du secrétariat particulier du maréchal Pétain, plus précisément du Bureau de documentations et d’archives crée par le docteur Bernard Ménétrel et qui était chargé de diffuser du matériel de propagande. Un partenariat très étroit s’instaura également entre le Secours national et l’administration des Postes qui délégua très épisodiquement à cet organisme caritatif l’ensemble de ses compétences relatives au choix des maquettes des futurs timbres-poste. Il organisa ainsi des concours autour de différents thèmes de société et dotés de prix relativement importants. Il sollicita d’autres artistes, parallèlement à ceux avec lesquels le secrétariat général des P.T.T. avait l’habitude de travailler. Toutefois, cela s’apparenta plutôt à une délégation temporaire de service public car la commission des timbres-postaux s’associa étroitement à ces figurines afin d’assurer le succès commercial et économique de ces opérations ponctuelles. Elle fut donc loin d’être dessaisie et continua même à jouer un rôle absolument déterminant. Mais elle dut toutefois composer avec de nouveaux interlocuteurs, ce dont elle semble s’être parfaitement accommodée d’ailleurs. Cette période fut en effet plutôt synonyme de créativité. De nouveaux formats de figurines postales furent expérimentées et surtout de nouvelles façons de les commercialiser sous la forme de séries « indivisibles » de douze, six voire quatre timbres-poste en jouant sur le goût atavique de l’exhaustivité partagé par de nombreux philatélistes. Il fut décidé, par exemple, à partir de 1943 d’émettre régulièrement des séries de six timbre-poste à l’effigie de personnages célèbres de l’histoire de France, chacune étant consacrée à un siècle différent voire à une période plus restreinte comme la Révolution de 1848 ou celle de 1789. Le secrétariat général des P.T.T. ayant reçu de nombreuses lettres demandant l’émission d’un timbre-poste à l’effigie de Montaigne. La première série fut construite, non sans arrière-pensées commerciales donc, autour de cette figure fédératrice dont c’était de plus en 1943 le 410ème anniversaire de la naissance. Le succès fut au rendez-vous car après le xvie siècle, ce fut au tour du xviie en 1944, du xve en 1946, puis du xviiie en 1949 et enfin en 1950 d’un choix de célébrités « révolutionnaires » d’être mis à l’honneur dans un ordre chronologique désormais restauré. De plus, afin d’identifier chronologiquement et graphiquement la figurine, chaque portrait fut inséré dans un cadre de style censé incarner chaque période. Pour la Révolution française, ce fut deux faisceaux de licteurs couronnés de deux bonnets phrygiens. En 1966, l’administration initia une nouvelle série relative cette fois à l’histoire de France au sens large du terme incluant « grands personnages » et « grandes dates » utilisant également un format plutôt inhabituel. Après Vercingétorix, Clovis, Charlemagne en 1966, furent célébrés Hugues Capet, Philippe Auguste, Saint-Louis en 1967 puis Philippe le Bel, Bertrand du Guesclin et Jeanne d’Arc en 1968. L’année suivante opère ensuite une douce transition vers la période moderne puisqu’à côté de Louis xi se trouvent « philatéliquement » mentionné Bayard et Henri iv. En 1970, ces évocations dépassèrent la grande figure du grand homme pour célébrer aussi les grandes dates car, après Richelieu et Louis xiv, c’est la bataille de Fontenoy qui fut à son tour évoquée. Dès 1966, la réalisation de ces figurines fut aussi confiée au même artiste Albert Décaris dont l’approche graphique est plutôt caractéristique ce qui accentua encore la cohérence visuelle de l’ensemble.

Toutefois, que ce soit dans le cadre d’un fonctionnement normal, dégradé ou simplement délégué, il ne faut pas non plus surestimer le rôle de la commission des timbres-postaux pour ce qui concerne le choix des thématiques car elle puisait largement son inspiration dans l’air du temps et le calendrier commémoratif qu’il soit national ou plus spécifique à certaines institutions. De ce point de vue l’imagerie postale de la Révolution française ne présente d’ailleurs aucun caractère exceptionnel car ces émissions sont intervenues soit dans un contexte commémoratif, centenaire ou plutôt sesquicentenaire à savoir le cent-cinquantième anniversaire en 1939 et le bicentenaire en 1989, soit dans le cadre de ces séries transversales initiées par l’administration des Postes elle-même. Ce recensement a été effectué à partir du catalogue spécialisé Yvert et Tellier qui constitue l’une des références en la matière depuis plus d’un siècle désormais et il a concerné l’ensemble des figurines émises en France métropolitaine depuis le 1er janvier 1849 qu’il s’agisse des timbres-poste dits d’usage courant ou de ceux dits de collection mais dont l’audience dépasse ou plutôt dépassait largement le public des seuls philatélistes « déclarés » [23]. En effet, jusque dans les années quatre-vingt-dix, la philatélie était l’un des loisirs préférés des Français et la pratique de la collection était répandue dans toutes les catégories sociales comme dans toutes les classes d’âge. Les émissions de timbres-poste bénéficiaient d’ailleurs et d’une manière plutôt systématique de petits encarts dans la presse nationale et le journal Le Monde y allait même de son supplément mensuel Le Monde des Philatélistes. Cependant, ces timbres-poste sont loin de représenter la totalité de la production philatélique dont la variété n’a d’égale que la disparité, ce qui vaut pour les objets comme d’ailleurs les pratiques[24]. Toutefois, cela n’est pas sans poser quelques problèmes méthodologiques. Il existe en effet d’autres catégories de timbres-poste comme, par exemple pour les plus courants, les timbres-taxe destinés à compléter la valeur de l’affranchissement. Il y a également les timbres préoblitérés c’est-à-dire déjà surchargés d’une marque postale et plutôt utilisés pour des envois massifs ou enfin ceux relevant de la poste aérienne. Néanmoins, outre le fait qu’ils ne comportent aucune allusion révolutionnaire, ils demeurent d’un usage plus que marginal. Faut-il nécessairement y adjoindre les enveloppes dites « premier jour », souvenirs philatéliques émis lors de la mise en vente du timbre-poste et les timbres à date ? En effet, la première oblitération de cette nature intervint à l’occasion de la mise en vente anticipée du timbre-poste commémorant le centenaire de la mort de Rouget de l’Isle en 1936. Toutefois, ces oblitérations ne font que reprendre les principaux éléments constitutifs du timbre-poste dont elles accompagnent la mise en vente (figure n°1). Quant aux timbres à date, qui s’en rapprochent beaucoup, car il s’agit de cachets commémoratifs qui sont apposés le jour d’une manifestation et pas seulement philatélique d’ailleurs, il est très difficile d’en avoir une approche exhaustive car ils sont souvent nés d’une initiative locale. C’est le cas également enfin des autres souvenirs philatéliques émis dans la foulée du déploiement du nouveau service d’impression Mon timbre en ligne et bien que certains le soient officiellement sous l’égide de La Poste. Ainsi quatre vignettes autocollantes commémorant en septembre 2019 le 230ème anniversaire de la Révolution française ont été éditées parallèlement à l’exposition « La Révolution s’affiche » organisée du 21 septembre au 15 novembre 2019 à l’Assemblée nationale. Mais son tirage a seulement 7000 exemplaires ne peut assurément être comparé à celui des timbres-poste « classiques »[25].

Ces timbres-poste ne représentent toutefois qu’un pourcentage plutôt infime, un peu moins de 1 %, des quelques 5000 figurines émises en France métropolitaine, 7500 même en y incluant les vignettes autocollantes. Superficiellement, cela peut même paraitre anecdotique. Mais c’est en réalité une concentration non négligeable pour un corpus iconographique dont l’hétérogénéité est pour ainsi dire structurelle comme en témoigne les index thématiques des catalogues spécialisés qui comportent chacun plusieurs milliers d’entrées et pour la plupart uniques [26]. De plus, au-delà de ces seuls pourcentages, c’est plus de deux cent soixante-dix millions de timbres-poste qui ont été émis puis diffusés en France depuis la première émission intervenue en 1936.

Temporalité oblige, c’est la ve République qui concentre très logiquement la grande majorité de ces émissions de timbres-poste avec près de 81 % des figurines recensées. Toutefois, une telle partition ne signifie pas grand-chose compte tenu de la durée inégale des régimes traversés par cette imagerie : soixante-dix ans pour la iiie République, deux ans et quatre mois pour le GPRF, douze ans pour la ive République et plus de soixante pour la ve République, en plein âge d’or de la philatélie (graphique n°1). De plus, la plus forte concentration de timbres-poste « révolutionnaires » intervient principalement en 1989 à l’occasion de la commémoration de son bicentenaire car vingt-deux figurines furent émises durant cette seule année. Elles représentent d’ailleurs plus de 41 % du total des émissions de 1989 et pas moins de 46 % de ce corpus thématique. C’est donc le deuxième septennat de François Mitterrand qui concentre une part majeure de ces timbres-poste « révolutionnaires ». Sous la ve République, ce mouvement fut cependant initié par Georges Pompidou et partagé également par Jacques Chirac mais dans des proportions néanmoins beaucoup plus modestes (graphique n°2). Un tel volume a également permis également l’expression d’une certaine diversité. Ces figurines se ventilent, en effet, entre quatre sous-catégories thématiques d’une manière tout aussi inégale d’ailleurs (graphique n°3). L’évocation de personnages célèbres en concentre près de 44 %, comme si la période avait permis une véritable éclosion d’individualités remarquables. La valorisation de l’héritage révolutionnaire occupe ensuite, avec 25 %, le second rang. Plus en retrait et, un peu paradoxalement d’ailleurs, viennent ensuite la commémoration des grandes dates puis les allégories républicaines mettant en scène la devise de l’Etat français ou la déclaration universelle des droits de l’homme.

Le long prologue de l’imagerie postale révolutionnaire (1936-1988)

Les deux premières allusions à la Révolution française dans le corpus iconographique postal intervinrent donc plutôt tardivement surtout eu égard au caractère presque « constituant » de l’événement pour la iiie République. Ce n’est en effet que le 27 juin 1936 que furent émis les deux premiers timbres-poste dans le cadre de la commémoration du centenaire de la mort de Rouget de l’Isle. La demande émanait initialement de Louis de Diesbach, conseiller général et député du Pas-de-Calais appartenant au groupe des Républicains de Gauche mais également anciens combattants à laquelle le ministre des P.T.T. d’alors, Georges Mandel, donna suite favorable d’autant qu’elle était relayée par un certain nombre d’associations patriotiques dont il était proche[27]. La première figurine fut dessinée et gravée par Antonin Delzers d’après la statue de Bartholdi à Lons-le-Saulnier, la ville de naissance du compositeur (figure n°2)[28]. Quant à la seconde, œuvre du Jules Piel, il s’agissait d’un détail majeur de l’œuvre éponyme de Rudé sur l’un des piédroits de l’Arc de triomphe et dont ce n’était pas d’ailleurs la première apparition dans l’imagerie postale française (figure n°3). Cependant, la fois ou plutôt les fois précédentes, car le timbre-poste émis en 1917 fut de nouveau réimprimé en 1922 puis en 1926, il s’agissait plutôt de magnifier la résistance et la victoire française lors de la Première guerre mondiale, tout en la doublant d’une opération caritative. En 1939, à l’occasion cette fois du 150ème anniversaire de 1789, c’est le tableau de David ou tout du moins commencé par lui, le Serment du Jeu de Paume, qui servit de support commémoratif (figure n°4). Puis intervint la longue parenthèse de Vichy et de l’immédiate après-guerre car ce n’est que le 10 juillet 1950 qu’intervint l’émission d’une série de six timbres-poste à l’effigie de personnages célèbres associés à la Révolution française. A cette occasion, l’administration des postes opta comme les fois précédentes pour un panel jugé représentatif de célébrités, non pas du siècle cette fois mais plutôt rattachées à l’évènement. Il y eu ainsi un homme de lettres en la personne d’André-Marie de Chénier mais aussi un peintre illustre qui ne pouvait guère être que David, un scientifique avec Lazare Carnot, deux hommes politiques antagonistes, Danton et Robespierre (figures n°5 et 6) et enfin un militaire Lazare Hoche. Trois de ces figurines furent réalisées d’après des œuvres existantes et les trois autres furent en revanche des créations artistiques originales. Ce n’était toutefois pas les premiers « révolutionnaires » à être ainsi touché par la grâce philatélique car leurs cadets de 1848 les déjà avaient précédés dans cette galerie philatélique mais dans le cadre de la célébration du centenaire de la Révolution de 1848 et sous un format plus inhabituel, unique d’ailleurs, d’une série de huit figurines.

L’année 1971 représente ensuite un premier tournant dans l’imagerie postale de la Révolution française. En effet, au-delà de ces figures tutélaires, l’imagerie postale va s’intéresser à l’événement en tant que tel avec l’émission de trois figurines faisant de cette série de timbres-poste d’un format exorbitant dessinée et gravée depuis 1966 par Albert Décaris. Il proposa à l’administration des Postes pas moins de sept projets. Deux concernèrent la réunion des Etats-Généraux pour laquelle, l’artiste s’inspira assez librement d’un tableau d’Horace Vernet et deux autres encore la prise de la Bastille sous deux angles de vue différents (figure n°7). Il suggéra également une allusion à la levée en masse, aux soldats de l’an ii et à la mort de Joseph Bara dans lesquelles l’empreinte des manuels scolaires des écoliers français semblait assez prégnante[29]. En effet, si le style graphique d’Albert Décaris est absolument reconnaissable entre-tous, la construction de chaque figurine s’avère, en revanche, plus classique et s’inscrit plutôt dans la lignée des affiches pédagogiques distribuées notamment par La Maison des instituteurs.

Cette première irruption resta cependant sans lendemain car la Révolution française va temporairement mais totalement disparaitre du panorama philatélique française jusqu’en 1988. Une paire de figurines est en effet émise le 20 juin afin de commémorer le bicentenaire de la « journée des tuiles » souvent présentée comme la préfiguration de 1789. Un retour aussi timide que discret mais qui annonçait cependant, à l’instar de l’événement qu’il commémorait d’ailleurs, l’acmé de 1989. Celle-ci fut également synonyme de profonds bouleversements pour l’imagerie postale de la Révolution française et pas seulement sur le plan quantitatif d’ailleurs. En effet, ce bicentenaire fut à bien des égards synonyme d’une double voire triple révolution iconographique. A la fin de la décennie quatre-vingt, la philatélie commence à être en perte de vitesse et concurrencée par d’autres activités de loisirs. Elle cherche donc à se renouveler en accédant à une dimension plus ludique et susceptible donc d’intéresser un plus large public. A l’instar d’autres philatélies commerciales, elle expérimenta ainsi différents formats, commercialisa ses figurines sous forme de séries de quatre à six timbres-poste, de blocs, de bandes. Cela n’avait rien de novateur en soit mais il n’était jamais arrivé par le passé qu’une telle variété intervienne durant la même année. Différents procédés de fabrication furent également employés. Outre la traditionnelle taille-douce, l’héliographie, procédé mixte entre taille-douce et offset initièrent une évolution chromatique de l’imagerie postale française qui la rapprocha des autres philatélies et notamment les plus commercialement instrumentalisées. Toutefois, peu de créations originales durant cette période pourtant féconde. Elle contribua plutôt même à uniformiser l’imagerie postale de la Révolution française en la rapprochant de l’imagerie scolaire voire de celle présente sur des supports plus inattendus. La question des droits n’y est sans doute pas étrangère. En effet, les iconographes semblent avoir puisé dans le même corpus iconographique dont Annie Duprat a montré la redécouverte récurrente[30]. Ce rapprochement des imageries contribua à bien des égards à la banaliser. Les mêmes tableaux, les mêmes gravures se retrouvèrent en effet sur les timbres-poste mais également dans les manuels scolaires, des boites d’allumettes, des verres, des assiettes, des plateaux les incrustant dans une quotidienneté qui génère généralement plus d’indifférence que d’intérêt.

L’acmé du Bicentenaire et après …

Le bicentenaire philatélique commença dès le 2 janvier 1989 avec l’émission d’un premier timbre-poste sous la forme d’une création originale de Jean-Michel Folon[31]. Cette entrée dans l’année du bicentenaire s’est donc effectuée par l’intermédiaire d’un artiste contemporain de renommée mondiale qui a privilégié dans sa création originale des signes d’une grande clarté. Ils constituent même une véritable chaine de symboles signifiants. Les trois silhouettes d’oiseaux blancs, à la fois identiques et indissociables se détachant sur un fond bleu et rouge viennent symboliser la liberté, l’égalité et la fraternité dans une dimension tricolore (figure n°1). Le mois suivant, le 27 février, une série de six timbres-poste mit à l’honneur quelques-unes de ses grandes figures de la période révolutionnaires. Un choix quelque peu hétéroclite néanmoins ou l’abbé Sieyès, Mirabeau, le vicomte de Noailles et Lafayette cohabitent avec Barnave et Jean-Baptiste Drouet (figure n°8). Les six figurines furent dessinées et gravées par Pierre Forget ce qui donna à l’ensemble une grande cohérence graphique et ce fut également une création artistique originale contemporaine, comme si l’événement bénéficiait désormais d’une appropriation totale par la société française. En outre, elles se sont affranchies du portrait pour représenter la personnalité honorée dans son contexte et chaque scénette fut également insérée pour ne pas dire presque enchâssée dans un profil de Marianne stylisé et déclinée là encore aux couleurs du drapeau tricolore. Après ces deux expériences iconographiques, l’administration des postes revint avec un triptyque de facture très classique, copie d’une gravure ancienne (figure n°9). Le 21 juin 1989, à l’approche d’un 14 juillet qui se devait faire date, le timbre-poste revisita ses classiques avec une étude de David pour le Serment du Jeu de Paume (figure n°10). Puis, quelques jours après, intervinrent de nouvelles émissions révolutionnaires avec quatre personnages célèbres, Manon Roland, Camille Desmoulins, Condorcet et Kellermann, les trois premiers partageant d’ailleurs le destin de ne pas avoir survécu à l’année 1794. Ce bloc du quatre figurines fut là aussi réalisée par la même artiste Marie-Noëlle Goffin qui semble s’être inspirée des gravures anciennes aquarellées. Les personnalités choisies furent également représentées en pied et contextualisées en arrière-plan. Mais, le point d’orgue est toutefois émis le 7 juillet 1989 avec un bloc de quatre timbres-poste reproduisant la déclaration universelle des droits de l’homme dans un décor très classique, pour ne pas dire « pompier » et dont le caractère un peu convenu fut tempérée par une version plus résolument contemporaine, mais toutes deux néanmoins sous la surveillance de l’œil de la providence (figures n°11 et 12).

Le Bicentenaire fut également l’occasion d’un rapprochement entre l’imagerie révolutionnaire d’une part et l’imagerie républicaine d’autre part. En effet, en dépit de sa richesse intrinsèque, ces cinquante-trois timbres-poste ne peuvent assurément prétendre résumer le foisonnement iconographique des représentations de la Révolution française. D’autant que certains sujets sont redondants. Toutefois, indépendamment de cette réserve quantitative, ce corpus iconographique paraît étonnant familier et ceci indépendamment d’ailleurs de la présence ou non de cette thématique dans les calendriers annuels d’émissions. Il est probable qu’elle est souvent inconsciemment associée, sinon confondue, avec celle plus omniprésente de la République. Un tel rapprochement n’allait cependant pas de soi. En effet, bien que les révolutionnaires de l’An i qui croyaient à la vertu pédagogique des images aient opté pour une incarnation féminine vêtue à l’Antique aussi affranchie car coiffée d’un bonnet phrygien et que symboliquement combattante avec son faisceau d’armes, ceux de l’an II lui préférèrent sur les premiers timbres-poste le profil de l’agrarienne et sans doute plus consensuelle Cérès, la déesse romaine de la moisson. Comme le souligne Alain Chatriot citant Maurice Agulhon, il s’agit plus d’un choix négatif permettant d’éluder le bonnet phrygien et non d’un choix positif honorant la ruralité[32]. Toutefois, après 1981 l’administration des Postes effectua un retour aux sources révolutionnaires mais dans un premier temps avec celles de 1830 et un détail du tableau de d’Eugène Delacroix La Liberté guidant le peuple (figure n°14) et c’est le même François Mitterrand qui ancra définitivement Marianne dans l’imagerie postale révolutionnaire. Il initia en effet le projet d’émission d’une nouvelle Marianne parallèlement à la célébration du bicentenaire de la Révolution française et il en arrêta même personnellement le choix. Cette maquette présentée par Louis Briat a été conçue informatiquement et bien qu´elle soit monochrome, elle symbolise les trois couleurs nationales par les trois bandes verticales et une cocarde dans le coin droit (figure n°15). C´est la seule également qui est représentée de face.  Elle fut d’ailleurs plutôt mal reçue par l’opinion publique tout du moins philatélique. Toutefois, comme aurait pu le laisser supposer cette première série de trois tableaux révolutionnaires émise en 1971, il n’y eu pas de fusion entre l’imagerie postale et l’imagerie scolaire. Certes, le bicentenaire fut l’occasion de rapprochements à la graphiques et iconographiques avec, par exemple, la généralisation des reproductions polychromes ou des gravures aquarellées de style. Certaines évocations furent également partagées, à l’instar du serment du Jeu de Paume, de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen. Toutefois, l’imagerie postale fut loin d’être aussi foisonnante. De plus, son statut de valeur fiduciaire lui interdisait certains sujets jugés non-consensuels comme la mort de Louis xvi, la Terreur … Cette même réserve explique sa distance avec les autres imageries récréatives qui du fait de leur caractère ludique pouvait se permettent toutes les outrances susceptibles de leur ouvrir d’autres possibles sur le plan commercial.

Ce qui s’apparente à un véritable raz-de-marée philatélique aurait pu être un déferlement sans lendemain et ne connaître ultérieurement aucun prolongement ; un simple épiphénomène conjoncturel donc aussi intense que limité à l’année 1989. Certes, d’un point de vue quantitatif, les émissions de timbres-poste autour du thème générique de la Révolution française enregistrèrent un très net recul. Mais, elles ne disparaissent pas pour autant du paysage iconographique postal. Ainsi en 1990 est émis un nouveau bloc de quatre figurines comportant deux timbres-poste à l’effigie de personnages illustres, Gaspard Monge et l’abbé Grégoire dont les cendres venaient d’être transférées au Panthéon et deux « réalisations révolutionnaires » dont c’était le bicentenaire à savoir le drapeau tricolore et la création des départements (figure n°16). Il faut remarquer que les marges du bloc furent investies par une frise très dense ou s’entremêlent des fragments de manuscrit et des instruments de géométrie qui ne sont pas étrangers à la symbolique maçonnique. L’année suivante ce fut au tour et selon les mêmes modalités de La Tour d’Auvergne et de Saint-Just associé aux arbres de la liberté et à la gendarmerie dont c’était effectivement le bicentenaire de la création en 1991. Après cette déferlante iconographique, l’imagerie postale sembla alors revenir à des valeurs traditionnelles et déjà constatée avant 1989. Elles paraissent également s’affranchir de l’événement en lui-même à l’exception de l’épisode de Valmy qui, après 1971, fit de nouveau l’objet d’un autre timbre-poste en 2006 mais, plus sous l’angle touristique et régional cette fois, que véritablement historique. Elles se focalisent également pour une grande majorité sur l’héritage révolutionnaire. Qu’il s’agisse de l’héritage symbolique comme le drapeau tricolore mais surtout institutionnel avec différentes émissions sur l’Assemblée nationale en 1995 puis 2015 mais également les plus hautes juridictions comme le Conseil d’Etat et les grands corps avec Polytechnique ou l’Ecole normale supérieure.

En 1889, l’imagerie postale n’est encore que balbutiante et demeure toujours profondément engoncée dans le carcan étroit de la symbolique monétaire. En effet, si elle enregistra durant cette période de timides esquisses de diversification, la plupart néanmoins demeurèrent sans lendemain philatélique durable. Cette « jeunesse » toute relative peut-elle cependant expliquer son omission lors des différentes manifestations qui commémorèrent le centenaire de la Révolution française ? En effet, ces quarante premières années d’existence auraient pu, sinon dû, sceller l’accès à une certaine forme de maturité sur le plan institutionnel. D’autant que les cérémonies organisées à cette occasion utilisèrent des supports très variés mêlant dans un même élan commémoratif, passé et futur, tradition et modernité[33]. Il est bien certain que le timbre-poste en qualité de nouveau reflet de l’Etat aurait pu y trouver toute sa place entre les défilés, les banquets, les illuminations électriques, les panthéonisations, l’exposition universelle ou même la Tour Eiffel qui fut mise à contribution ainsi que la ville de Paris dans son ensemble avec certaines opérations d’urbanisme[34].

Un premier rendez-vous manqué donc que l’administration des Postes tenta de rattraper en 1939 avec l’invention philatélique du sesquicentenaire, à savoir la commémoration du cent-cinquantième anniversaire de l’événement. Un cycle assez unique dont il existe d’ailleurs un autre exemple en 1999 avec celui de l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris (1849-1999) et qui constitue une façon de célébrer sans attendre l’onction de la double sécularité. Ce timbre-poste fut d’ailleurs à bien des égards l’un des rares témoins privilégiés de cette commémoration car la proximité du second conflit mondial annula bon nombre sinon la plupart des manifestations prévues au niveau national comme local. Toutefois, en dépit de la multiplication de ces contretemps conjoncturels cette commémoration philatélique s’étendit à la presque totalité de l’empire colonial à l’exception notable de l’Algérie, du Maroc et de la Tunisie avec l’émission d’une série de cinq timbres-poste représentant la prise de la Bastille encadrée de deux faisceaux coiffés de bonnet phrygien.

L’avenir dira en 2039 si cette notion de demi-siècle tient encore car il est probable en revanche, tout du moins pour ce qui concerne la Révolution française, que l’acmé du bicentenaire de 1989 soit son seul et unique point d’orgue philatélique. En effet, l’évolution à la baisse des volumes et donc des profits générés par les envois de correspondance se confirmant d’année en année, il est probable qu’en 2089, le timbre-poste ne pourra sans doute guère prétendre à un autre statut que celui d’artefact un peu désuet d’une époque définitivement révolue.

 

Grégory Aupiais

 

Une révolution dentelée ou l’imagerie postale de la Révolution française des origines à nos jours

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Inventaire de l’imagerie postale de la Révolution française des origines à nos jours

 

Résumé :

Le timbre-poste est assurément un fils de la Révolution non pas de 1789, ni même de 1830, mais de 1848 car il a été inventé le 1er janvier 1849 par la iie République. Un héritage institutionnel qui explique peut-être qu’il se soit fait l’écho des représentations de la Révolution française. En effet de la première allusion philatélique en 1936 au raz-de-marée iconographique de 1789 ou cette seule thématique représenta pas moins de 41 % du total des émissions de timbres-poste de l’année, ces figurines sont comme autant de petits miroirs de représentations de l’événement au sein de la société française. D’autant qu’elles semblent avoir un caractère aussi récurrent que prégnant car elles se confondent souvent avec celles de la République.

[1] Liste des principaux thèmes abordés par l’iconographie postale française au xxe siècle (par ordre alphabétique) : « armée », « arts et lettres », « événement historique », « expositions, congrès, conférences » « série courante », « sciences et techniques », « séries touristiques », « vie économique et sociale », « vie politique ».

[2] Dominique Poulot, « Le Panthéon des timbres-poste », L’Histoire, n°90, juin 1986, p. 89-92.

[3] Dans un article méthodologique, David Scott consacre un long développement à l’imagerie postale de la Révolution française afin de démontrer notamment la densité idéologique du timbre-poste. Voir David Scott, « La sémiotique du timbre-poste », communication & langages, n°120, 2e trimestre 1999, p. 81-93.

[4] Véronique Chocron : « La Poste : la chute des volumes de courrier s’accélère », Le Monde, 21 février 2019 : https://www.lemonde.fr/economie/article/2019/02/21/la-poste-la-chute-des-volumes-de-courrier-s-accelere_5426351_3234.html

[5] « Le service postal face à la baisse du courrier : des transformations à poursuivre », rapport public annuel 2020, février 2020, Cour des comptes : https://www.ccomptes.fr/system/files/2020-02/20200225-10-TomeI-service-postal-face-baisse-courrier.pdf

[6] Il s’agit du 4 f. 50 dessiné par Paul-Pierre Lemagny et gravé par Pierre Gandon. Voir Robert O. Paxton, La France de Vichy 1940 – 1944, Paris, Le Seuil (coll. « L’univers historique »), 1997.

[7] William. A. Hoisington, « Politics and postage stamps, the postal issues of the french state and empire 1940 – 1944 », French Historical Studies, volume 7, n° 3, Spring, 1972, p. 349-397.

[8] Laurent Gervereau, Denis Peschanski (dir.), La propagande sous Vichy, 1940-1944, Nanterre, Bibliothèque de documentation internationale contemporaine, 1990, pp. 216-218.

[9] Laurent Gervereau, Voir comprendre et analyser les images, Paris, La Découverte, 1993, p. 157.

[10] Dominique Veillon, Claude Levy, « Propagande et modelage des esprits », dans Jean-Pierre Azéma, François Bédarida (dir.), Le régime de Vichy et les Français, Paris, Fayard, 1992, p. 184-203. Denis Peschanski, Vichy 1940-1944, contrôle et exclusion, Bruxelles, Complexes, 1997. Id, «  Vichy au singulier, vichy au pluriel. Une tentative avortée d’encadrement de la société 1941 – 1942  », Annales E.S.C. , n° 3, 1998, p. 632-661.

[11] Alain Croix, Didier Guyvarc’h ; Timbres en guerre. La mémoire des deux conflits mondiaux, Rennes, Presses universitaires de Rennes, (coll. « Histoire »), 2016. Grégory Aupiais, « Fin d’un siècle ou fin d’un cycle : l’itinéraire iconographique de l’imagerie postale de la Grande Guerre de l’armistice à nos jours (1918-2018), Les Cahiers de la FNARH, n°136, n° spécial « Commémoration du centenaire 14-18 », 2018, p. 41-46.

[12] Laurent Douzou, Jean Novosseloff ; La Résistance oblitérée. Sa mémoire gravée par les timbres, Paris, Editions du Félin, 2017.

[13] Jean-François Brun (dir.), Le patrimoine du timbre-poste français, Charenton-le-Pont, Editions Flohic (coll. « Le Patrimoine des Institutions »), 1998. Avant 2017, quelques articles parus dans Le Monde des Philatélistes puis dans Timbres magazine avaient également initié cette approche globale. Voir notamment Alain Chatriot « Les timbres surtaxés des années 30 », Le Monde des Philatélistes, n°506, avril 1996, p. 33-36 ; Grégory Aupiais, « 1944, Oradour-sur-Glane : un enjeu de mémoire ? », Timbres magazine n°13, mai 2001, p. 97-98 ; Id, « Images d’une France résistante », Timbres magazine, n°40, novembre 2003, p. 99-100.

[14] Dans un numéro de la revue universitaire Protée spécialisée dans le champ de la sémiotique, sciences des signes, du langage et des discours et parrainée par le département des arts et lettres de l’Université du Québec à Chicoutimi, David Scott a coordonné un dossier intitulé « Sémiologie et herméneutique du timbre-poste », Protée, vol. 30, n°2, automne 2002. Voir également Id, « Une révolution en miniature. Sémiotique du timbre-poste commémoratif du Bicentenaire de la Révolution française », Word & Image, xi, n°2, 1993, p. 97-113.

[15] Maurice Agulhon, « Esquisse pour une archéologie de la République. L’allégorie civique », Annales. Economies, société, civilisations, 28ème année, n°1, pp. 5-34. Id Marianne au combat : l’imagerie et la symbolique républicaine de 1789 à 1880, Paris, Flammarion, 1979. Id,

Marianne au combat : l’imagerie et la symbolique républicaine de 1809 à 1914, Paris, Flammarion, 1989. Id, Les Métamorphoses de Marianne. L’imagerie et la symbolique républicaines de 1914 à nos jours, Paris, Flammarion, 2001.

[16] Frédéric Rousseau, « Mémoire de coq : mémoire politique et politique de la mémoire en France à travers ses émissions philatéliques de 1944 à 1994 », dans Marianne Caron-Leulliez, Jean Sagnes, Roland Andréani, Pratiques et cultures politiques dans la France contemporaine. Hommage à Raymond Huard, Université Paul Valery, Montpellier, 1995, p. 141-163. Patrick Laurens, « La figure officielle de la République française : monnaies et timbres » dans Christophe Charle, Jacqueline Lalouette, Michel Pigenet et Anne-Marie Sohnin (dir.) ; La France démocratique (combats, mentalités, symboles). Mélanges offerts à Maurice Agulhon, Paris, Publications de la Sorbonne, 1998

[17]Alain Chatriot, «Marianne et Germania. Les figures postales de la souveraineté en Allemagne et en France, 1870-1949 », dans Alain Chatriot, Dieter Gosewinkel (dir.), Figurationen des Staates in Deutschland und Frankreich, 1870-1945. Les figures de l’État en Allemagne et en France, Munich, Oldenbourg, Pariser Historische Studien des Deutschen Historischen Institut, Paris, 2006, pp. 277-294.

[18]  Id, « Les timbres-poste : un révélateur de la difficile figuration des républiques », Cahiers Jaurès, n°219-220, p.21-35.

[19]Alain Chatriot, Michel Coste, « Les timbres-poste », dans Vincent Duclert, Christophe Prochasson (dir.), Dictionnaire critique de la République, Paris, Flammarion, 2002, pp. 972-977. Toutefois, dès 1997 puis de nouveau en 2001, David Scott avait rédigé la notice relative aux timbres-poste dans deux ouvrages de référence, à savoir L’Encyclopedia of Semiotics et French Culture and Society, a glossary

[20] Jacques Leclerc, « Iconologie politique du timbre-poste indonésien (1950-1970) », Archipel, vol. 3, 1973, p. 145-183 ; Jean Sarraméa, « L’Egypte nassérienne à travers la philatélie », L’information historique, n° 52, 1990, pp. 186-191, Id, « La philatélie d’un dragon d’extrême orient : la Corée du sud », L’information historique, n°54, 1992, p. 186-191, Id, « Le Kémalisme dans la philatélie de la Turquie », L’information historique, n° 54, 1992, p. 185-190 ; Frédéric Rousseau, « La philatélie allemande entre mémoire et amnésie ( 1949-1998 ) », Vingtième siècle, n° 59, 1990, p. 186-191.

[21] Alain Croix ; « L’image dentelée de la Bretagne » dans Jean-Yves Andrieux, Marianne Grivel (dir.) ; Bretagne. Art, Création, société. Mélanges en l’honneur de Denise Delouche, Rennes, Presses universitaire de Rennes, 1997, pp.131-141, Grégory Aupiais, « Les représentations de la Bretagne dans l’iconographie postale française au xxe siècle », Annales de Bretagne et des Pays de l’Ouest 112 (1), 2005, p. 33-41.

[22] Grégory Aupiais, « Le patrimoine postal de la Grande Guerre », In Situ [En ligne], 25 | 2014, mis en ligne le 15 décembre 2014, URL : http://insitu.revues.org/11591 ; DOI :10.4000/insitu ; Id, « Fin d’un siècle ou fin d’un cycle : l’itinéraire iconographique de l’imagerie postale de la Grande Guerre de l’armistice à nos jours (1918-2018), Les Cahiers de la FNARH, n°136, n° spécial « Commémoration du centenaire 14-18 », 2018, p. 41-46 ; Id, « Un devoir de mémoire périphérique ou l’imagerie postale de la Seconde Guerre mondiale des origines à nos jours », Guerres mondiales et conflits contemporains, 2020/4, n°280, p. 123-140.

[23] Yvert & Tellier, Catalogue de timbres-poste 2013, France, Amiens, Editions Yvert & Tellier, 2012.

[24] Dominique Buffier, Roland Granier, Pierre Jullien, La philatélie. Collections et placements, Paris, Presses Universitaires de France (coll. Que sais-je ?), 1998. Voir notamment le chapitre ii « Typologie des produits et pratiques philathéliques »

[25] Sur ce souvenir philatélique voir le l’article sur le blog de Pierre Jullien, journaliste au Monde Economie ancien rédacteur en chef du Monde des philatélistes puis de Timbres magazine Rédacteur de la rubrique philatélique hebdomadaire du « Monde » de 1986 à 2006 :

https://www.lemonde.fr/mondephilatelique/article/2019/08/02/quatre-timbres-revolutionnaires-a-la-rentree_5495825_5470897.html

[26] Yvert & Tellier, Op. cit. , pp. 17-38.

[27] Musée de La Poste, Dossiers d’émission, 1936.

[28] Ces quatorze des quinze figures sont extraites de l’inventaire dressé par Bernard Le Lann sur son site Internet :  http://www.phil-ouest.com/ . Elles utilisent la numérotation du catalogue de timbres-poste Yvert & Tellier.

[29] Voir notamment le manuel d’histoire de cours élémentaire qui fut en vigueur jusqu’au début des années quatre-vingt. A. Bonifacio, L. Mérieult, Histoire de France CE1-CE2, Paris, Hachette (coll. « Classiques »), 1952.

[30] Annie Duprat, « Iconographie historique : une approche nouvelle ? » in Jean Clément Martin (dir.), La Révolution à l’œuvre : Perspectives actuelles dans l’histoire de la Révolution française, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2005, p. 293-304.

[31] David Scott, « Jean-Michel Folon. Sémioticien sans le savoir », Protée. Revue internationale de théories et de pratiques sémiotiques, vol. 30, n°2, automne 2002, p.57-58.

[32] Alain Chatriot, « Le visage de Cérès ou l’éternel retour de la République », Timbre magazine, n°7, novembre 2000, p. 44

[33] Pascal Ory, « Le centenaire de la Révolution française » dans Pierre Nora (dir.), Les Lieux de mémoire, vol. 1, Paris, Gallimard (coll. « Quarto »), pp. 463-492.

[34] Martine Boiteux, « Fête et Révolution. Des célébrations aux commémorations », Les Annales de la recherche urbaine, , n°43, « Révolution et aménagements », 1989, pp. 49-51.

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